Dans les destinations prisées, la gestion des locations de courte durée sur Airbnb est devenue un véritable casse-tête. Entre opportunités économiques et tensions immobilières, les services de conciergerie font face à de nombreux défis. Enquête sur un phénomène qui bouleverse l’équilibre des quartiers touristiques.
L’essor fulgurant de la conciergerie Airbnb
La conciergerie Airbnb s’est imposée comme un acteur incontournable du tourisme urbain. Ces entreprises gèrent de A à Z les locations de courte durée pour le compte des propriétaires : accueil des voyageurs, ménage, linge, maintenance… En 2022, on estimait à plus de 10 000 le nombre de conciergeries en France, dont 40% à Paris. « Notre activité a explosé ces dernières années. Nous gérons désormais plus de 500 appartements dans la capitale », témoigne Marc Dupont, fondateur d’une conciergerie parisienne.
Ce boom s’explique par la professionnalisation croissante des locations Airbnb. De plus en plus de propriétaires font appel à ces services pour optimiser leurs revenus locatifs sans avoir à s’en occuper. Les conciergeries promettent des taux d’occupation élevés et une gestion clé en main. Certaines affichent des rendements jusqu’à 30% supérieurs à une location classique.
Un impact majeur sur le marché immobilier local
Dans les zones touristiques, cette prolifération des meublés de tourisme n’est pas sans conséquence. À Barcelone, le nombre de logements Airbnb a bondi de 7 000 à plus de 20 000 en 5 ans. « Cela représente près de 7% du parc locatif de la ville », s’alarme Maria Garcia, chercheuse en urbanisme. Résultat : une pression accrue sur les loyers et une raréfaction des biens pour les habitants.
À Venise, la situation est encore plus critique. On y recense désormais 1 logement Airbnb pour 5 habitants dans le centre historique. « Les Vénitiens sont chassés de leur ville par la spéculation immobilière », déplore le maire Luigi Brugnaro. Les conciergeries sont accusées d’amplifier le phénomène en incitant les propriétaires à se tourner vers la location touristique.
Des nuisances pour les riverains
Au-delà de l’impact immobilier, la multiplication des meublés touristiques engendre des tensions dans les quartiers. Les va-et-vient incessants, le bruit nocturne, les incivilités… autant de nuisances pointées du doigt par les habitants. À Amsterdam, une étude révèle que 45% des résidents se plaignent de troubles liés aux locations Airbnb.
Les conciergeries peinent parfois à encadrer les comportements. « Nous faisons signer une charte aux voyageurs, mais il est difficile de tout contrôler », reconnaît Sophie Martin, gérante d’une conciergerie à Nice. Certaines villes comme Berlin ou New York ont d’ailleurs drastiquement limité les locations de courte durée pour préserver la qualité de vie des quartiers.
Le défi de la régulation pour les municipalités
Face à ces enjeux, les villes tentent de réguler l’activité des conciergeries Airbnb. À Paris, la mairie a instauré une limite de 120 jours par an pour la location d’une résidence principale. Elle impose aussi un numéro d’enregistrement pour chaque annonce. « Ces mesures ont permis de freiner la croissance des meublés touristiques », assure Ian Brossat, adjoint au logement.
Mais le contrôle reste complexe. Les conciergeries jouent parfois avec les limites de la légalité. Certaines gèrent des « résidences secondaires fictives » louées à l’année. D’autres contournent la limite des 120 jours en multipliant les annonces pour un même bien. « Il faut renforcer les contrôles et les sanctions », plaide Anne Hidalgo, maire de Paris.
L’enjeu de la professionnalisation du secteur
Pour faire face à ces défis, le secteur de la conciergerie Airbnb doit se structurer. Un label qualité a été créé en 2021 pour valoriser les acteurs vertueux. Il impose des critères stricts : respect de la réglementation, gestion responsable, qualité de service… « C’est un gage de confiance pour les propriétaires et les voyageurs », explique Pierre Dupont, président de la Fédération des conciergeries.
La formation est un autre enjeu majeur. « Nos métiers évoluent rapidement. Il faut sans cesse se former aux nouvelles technologies, aux normes d’hygiène… », souligne Marie Leroy, directrice d’une école spécialisée. Des cursus dédiés à la conciergerie Airbnb voient le jour dans les écoles de tourisme.
Vers un nouvel équilibre ?
L’avenir de la conciergerie Airbnb dans les zones touristiques reste incertain. Certaines villes comme Lisbonne ou Florence envisagent d’interdire totalement les nouvelles locations de courte durée dans leur centre historique. D’autres misent sur un développement plus harmonieux. À Bordeaux, la mairie a créé une commission réunissant habitants, hôteliers et conciergeries pour définir une stratégie commune.
Des initiatives innovantes émergent pour concilier tourisme et vie locale. À Lyon, une conciergerie propose aux voyageurs de participer à des projets associatifs durant leur séjour. À Marseille, une plateforme met en relation propriétaires et habitants à la recherche d’un logement temporaire. « Il faut inventer de nouveaux modèles plus durables », conclut Jean Viard, sociologue spécialiste du tourisme.
Entre régulation et innovation, le secteur de la conciergerie Airbnb est à la croisée des chemins. Son avenir dépendra de sa capacité à relever les défis posés par son développement fulgurant dans les zones touristiques. Un équilibre reste à trouver entre attractivité économique et préservation de la qualité de vie des habitants.